La taxe française sur les GAFA
En Europe, les géants du numérique bénéficient pour l’heure d’une imposition deux fois moins élevée que les entreprises classiques. Alors que les États européens sont à la recherche d’un point d’entente pour créer une taxe commune sur leurs chiffres d’affaires, la France en a décidé autrement en mettant en place, de façon unilatérale, sa propre « taxe GAFA ».
Déjà en vigueur depuis sa publication au Journal officiel le 25 juillet 2019, cette mesure fiscale dédiée aux services numériques devrait produire un rendement moyen de 500 millions d’euros par an à compter de 2020. Comme c’est une première du genre en France comme en Europe, l’application de ce nouveau dispositif a suscité de nombreuses critiques sur la toile… Explications.
Secteur du numérique en France : vers l’adoption de la taxe GAFA
Avant d’entrer dans le vif du sujet, rappelons que l’acronyme GAFA désigne les initiales des quatre grandes firmes internationales de l’économie numérique, notamment Google, Apple, Facebook et Amazon. En France, elles enregistraient un chiffre d’affaires de près de 1700 milliards de dollars en 2015 contre 1130 milliards de dollars seulement pour les entreprises françaises cotées au CAC 40 confondues.
- Pourquoi la France a adopté la taxe GAFA sur son territoire ?
Même si le Président français actuel a proposé la taxe GAFA dans son programme politique lors de l’élection présidentielle de 2017, l’idée actuelle de taxer les mastodontes du web ne lui appartient pas. Qu’à cela ne tienne, toute l’Europe se tourne vers la France en lui reprochant indirectement d’avoir emprunté une voie solitaire.
De son côté, Bercy se félicite de sa décision, sachant que de nombreux grands acteurs du numérique sont soupçonnés de profiter de montages financiers abusifs en évacuant leurs profits dans des paradis fiscaux. Effectivement, ces entreprises sont légales et paient leur impôt, mais à des niveaux largement inférieurs par rapport aux bénéfices réels qu’elles produisent. La mise en place de la taxe GAFA permet donc de rectifier, ou du moins d’alléger cette optimisation fiscale.
- Que dit la loi française sur la taxe GAFA ?
Approuvé par l’Assemblée nationale le 8 avril, puis validé par le Sénat le 21 mai, le texte de loi relatif à la « taxe GAFA » française a été promulgué au Journal officiel le 25 juillet dernier. Il est déjà appliqué sur tout le territoire et ses premiers effets sont attendus en 2020.
Les groupes étrangers dans la ligne de mire de Bercy
Pour l’heure, aucune liste définitive des entreprises imposables par cette nouvelle taxe n’a été communiquée. Néanmoins, le ministre de l’Économie et des Finances, Bruno Le Maire, annonçait une trentaine de sociétés lors d’une interview avec le Parisien.
- Les plateformes éligibles à la taxe GAFA
Selon toujours Bruno Le Maire, les principales plateformes concernées par la taxe GAFA sont celles qui prélèvent une commission via un service de mise en relation entre les entreprises et leurs clients. Par exemple Amazon qui joue un rôle d’intermédiaire entre les commerçants et les consommateurs, ou Uber qui se charge de mettre en relation des chauffeurs avec des passagers. Ne sont pas imposables, toutes entreprises numériques qui vendent leurs propres produits.
Bercy, de son côté, annonce que toutes les entreprises exploitant les données personnelles des internautes à des fins publicitaires devront se soumettre à cette nouvelle mesure fiscale. Voici donc une liste non exhaustive des sociétés numériques éligibles à ce prélèvement :
- Airbnb,
- Alibaba,
- Amadeus,
- Axel Springer,
- Booking,
- Criteo,
- Expedia,
- Rakuten,
- Expedia,
- Groupon,
Viennent s’ajouter à cette liste les grands noms tels qu’Amazon, Apple, Ebay, Facebook, Google, Twitter, Microsoft, Match.com, Recruit,Tripadvisor, Uber ou encore Zalando.
- Quid des entreprises françaises ?
Certes, la mise en vigueur de la taxe GAFA n’a pas pour but de nuire aux pépites nationales. Le gouvernement a donc mis en place un certain nombre de critères pour « trier » les entreprises qui devront s’acquitter de cette imposition. Concrètement, celle-ci concerne uniquement les sociétés réalisant un CA mondial de 750 millions d’euros et un CA de plus de 25 millions d’euros dans l’Hexagone. Avec cette double condition, Bercy cible particulièrement les grands groupes étrangers installés en France tout en épargnant les entreprises françaises telles que Darty, FNAC, Cdiscount, Blablacar ou encore SoLocal.
Des recettes fiscales de plus de 550 millions d’euros d’ici 2021
L’origine de la taxe GAFA ne date pas d’hier. Au début, les États membres de l’UE sont convenus de taxer certaines activités numériques à hauteur de 3 % de leur chiffre d’affaires. L’imposition concerne particulièrement la vente de données personnelles et d’espaces publicitaires en ligne ainsi que les services permettant de mettre en interaction les internautes entre eux.
Visiblement, Bercy ne s’est pas imposé à cette décision européenne. Après avoir débattu sur plusieurs taux, un seuil raisonnable fixé à 3 % a été adopté avec le Conseil de l’État. Concernant le rendement annuel de cette nouvelle mesure fiscale, il est estimé à 500 millions d’euros en moyenne selon le Chef du gouvernement, Édouard Philippe. En 2021, il devrait monter à 550 millions, puis 650 millions à l’horizon 2022.
Bien que la mise en vigueur de ce nouveau dispositif représente une source de revenu supplémentaire importante pour les caisses des finances publiques, elle suscite bien des critiques sur Internet ces derniers temps. A suivre…
Photos : clubic.com, liberation.fr