Uberisation : comprendre le phénomène
L’uberisation est une expression que vous avez sûrement entendu ou lu dans les médias ces dernières années. De plus en plus présent dans le langage commun, l’uberisation a fait son entrée dans le dictionnaire Larousse en 2017. Ce mot provient de l’entreprise américaine Uber qui propose à ses clients un service de voiture avec chauffeur via une application mobile. Le modèle économique de la société californienne est fortement lié aux évolutions numériques que nous connaissons aujourd’hui, mais la définition même de l’uberisation reste encore un mystère pour beaucoup.
Que signifie réellement ce terme ? L’uberisation est-elle présente dans le quotidien de chacun ? Quel impact a l’uberisation sur notre société et notre économie ?
Uberisation : définition
Le terme Uberisation provient de la marque UBER, une société américaine de voiture avec chauffeur. Les clients souhaitant un VTC sont mis en contact avec des chauffeurs par une application mobile. En quelques clics, vous ajoutez votre adresse de départ et votre adresse d’arrivée et l’application recherche des chauffeurs disponibles autour de vous. Simple, efficace et moins chère que les taxis traditionnels, l’application Uber a beaucoup de succès dans les grandes villes du monde entier. L’arrivée de ces nouveaux acteurs du transport a fait rugir les taxis, car les courses proposées par Uber sont bien plus abordables que les leurs. Ils y voient une concurrence déloyale.
Depuis l’installation de ces VTC, le terme uberisaiton a fait son apparition dans les médias comme dans le langage courant. Ce mot désigne un nouveau modèle économique où de nouveaux acteurs arrivent sur un marché en proposant des prix plus bas et en employant des indépendants au lieu de salariés mis en relation avec les clients via une application connectée à internet. L’uberisation concerne principalement l’angoisse pour des entreprises implantées depuis plusieurs années dans un secteur de voir arriver des start-ups proposant un service performant, tourné vers le numérique et les nouvelles pratiques des clients, mais surtout bien moins cher.
Cette expression a été utilisée pour la première fois en 2014 par un certain Maurice Levy.
Depuis, sa définition est devenue plus globale, car l’uberisation caractérise également la croissance du numérique dans l’économie et un nouveau modèle : la mise en relation directe entre les indépendants et les clients. La frontière devient de plus en plus floue entre l’entreprise et les consommateurs, car les indépendants proposant leurs services sont également des consommateurs. Ces entreprises innovantes permettent de mettre en relation des particuliers grâce à un nouvel intermédiaire, le plus souvent une plateforme numérique. Quand on utilise le terme uberisation, nous pouvons aussi parler d’économie collaborative.
Autre différence avec les entreprises classiques : les start-ups partisanes de l’uberisation sous-traite la majorité des tâches liées à leur secteur auprès d’indépendants. On appelle cette technique, le crowdsourcing.
L’uberisation dans votre quotidien
L’uberisation est de plus en plus présente dans votre quotidien. Peut-être même que sans le savoir, vous avez participé à l’uberisation de notre société en ayant recours aux services de ces nouvelles start-ups tournées vers le numérique. Comme nous l’avons vu, Uber est le premier exemple de l’uberisation de notre société, mais d’autres acteurs dans divers domaines d’activité n’ont pas raté le coche.
Le domaine de l’hôtellerie n’est pas épargné par l’uberisation avec l’avènement d’Airbnb, nouvelle plateforme permettant de mettre en relation des propriétaires d’appartements ou de maisons et des vacanciers.
Dorénavant, les particuliers peuvent louer leur logement sur une coute durée en le proposant à d’autres particuliers sur la plateforme Airbnb, véritable symbole de l’uberisation. Ici, la plateforme américaine joue seulement le rôle d’intermédiaire. Sur Airbnb, vous pouvez trouver des villas, des appartements ou des habitations plus atypiques pour quelques jours à des prix abordables. Passer une semaine à Paris en louant un appartement sur Airbnb reviendra moins cher qu’une chambre d’hôtel dans le centre de la capitale.
D’autres acteurs de l’uberisation se sont également installés dans le secteur de la livraison à domicile:
- Deliveroo
- Uber Eats (appartenant à l’entreprise californienne)
Ces deux acteurs proposent aux restaurants d’assurer un service de livraison à vélo pour les particuliers via leur application. Ces deux entreprises représentants de l’uberisation ont transformé les habitudes des consommateurs. Auparavant, les restaurants pouvant assurer ce service avaient leurs propres livreurs, aujourd’hui ils sont dépendants de Deliveroo et Uber Eats. Les livreurs de ces deux sociétés ne sont pas des salariés, mais des auto-entrepreneurs : plus ils travaillent, plus ils gagnent de l’argent. N’importe qui possédant un vélo peut s’inscrire à la plateforme et devenir livreur.
Les banques ne sont pas épargnées par le phénomène de l’uberisation avec des plateformes comme KissKissBankBank, digne représentante de cette économie collaborative. Si un particulier a un projet nécessitant une levée de fonds, il ne s’adressera plus à une banque traditionnelle pour obtenir un prêt, mais proposera son projet à des particuliers via KissKissBankBank. On appelle ce type d’uberisation, le crowdfounding. En résumé, le porteur du projet le présente et propose à des internautes d’y participer financièrement avec une contrepartie.
Par exemple, si une personne souhaite lancer une campagne de financement participatif pour produire son album, en contrepartie il proposera aux internautes de :
- recevoir l’album une fois terminé pour 10 euros investis
- recevoir l’album et une place de concert pour 20 euros investi
Chaque tranche d’euros investis propose de nouvelles contreparties.Une fois que l’objectif est atteint, le porteur du projet reçoit le financement provenant des particuliers.
Un autre domaine n’est pas épargné est celui du BTP. Quand vous avez quelques travaux à réaliser chez vous, vous vous tourniez auparavant vers des entreprises professionnelles, mais avec l’uberisation votre choix est moins arrêté. Certaines plateformes proposent à ses clients d’être mis en relation avec des ouvriers pour effectuer des travaux de petites envergures comme :
- la peinture
- la plomberie
- le jardinage
Vous pouvez réaliser un devis en ligne de ce dont vous avez besoin – comme la réparation d’un évier ou la peinture d’une chambre par exemple – et si le prix vous convient alors la plateforme Hello Casa vous mettra en relation avec des artisans pouvant réaliser cette tâche.
Les conséquences de l’uberisation ?
L’apparition de l’uberisation dans notre société et notre économie a provoqué de nombreuses réactions auprès des particuliers, mais également des entreprises classiques d’un secteur touché par ce phénomène. L’uberisation peut s’avérer être un gros avantage pour des personnes souhaitant faire appel au service proposé par la start-up et ceux souhaitant avoir un complément de salaire chaque mois en tant qu’auto-entrepreneur mais peut avoir des inconvénients pour les entreprises traditionnelles touchées par l’uberisation, mais aussi pour certains indépendants aux conditions de travail de plus en plus difficiles.
Les avantages pour l’économie et la population
L’arrivée de ces nouveaux acteurs partisans de l’uberisation permet de renouveler une économie, ouvre la voie à l’innovation et propose un service novateur et à bas prix aux consommateurs. Avec l’arrivée des entreprises représentantes de l’uberisation, l’auto-entrepreneuriat se relance, car c’est le statut obligatoire pour y travailler. En effet, tous les prestataires de ces applications doivent avoir le statut d’auto-entrepreneur. Cela leur permet d’avoir un complément de salaire pour certains, un job étudiant pour d’autres ou une manière de gagner de l’argent lorsqu’ils sont au chômage.
Ces auto-entrepreneurs participant à l’uberisation ne reçoivent pas un salaire comme c’est le cas d’un employé sous un contrat de type CDD ou CDI au sein d’une entreprise classique. En effet, ce qu’ils gagnent représente leur chiffre d’affaires en tant qu’indépendant. Plus il travaille, plus il gagne d’argent, car ils n’ont pas un revenu fixe. Ce statut leur permet d’avoir plus de liberté, car ils gèrent eux-mêmes leur emploi du temps et décide quand ils souhaitent travailler. Par exemple, un chauffeur Uber peut décider de travailler la journée comme la nuit et le temps qu’il le souhaite, cela peut être seulement quelques heures comme une nuit entière de huit heures.
Le gouvernement français a apporté un cadre à ce statut :
- une inscription simplifiée sur internet
- déclaration du Chiffre d’Affaires auprès de l’URSAFF
- 70 000 euros max de CA par an pour la prestation de service
Les autres avantages de l’uberisation concernent les consommateurs. En effet, ils peuvent avoir accès à des services plus facilement et à des prix plus abordables que ceux proposés par les entreprises classiques. Grâce à son application facile d’utilisation, Uber permet à ses clients de trouver facilement un VTC et à un coût moins élevé que les taxis classiques. De même pour Airbnb et sa plateforme de location de vacances.
Les services proposés par ces entreprises tournées vers l’innovation sont donc souvent moins chers, mais également meilleurs. Reprenons l’exemple d’Uber, le consommateur a le choix entre différentes classes de voitures selon son budget, il peut voyager en berline ou dans un van s’il est accompagné de plusieurs personnes. De plus, l’avantage pour ces consommateurs de l’uberisation est de connaître à l’avance le prix de la course qui est payé directement par CB sur l’application donc plus aucune mauvaise surprise.
Aujourd’hui, au fur à mesure tous les domaines d’activité sont touchés par l’uberisation alors n’importe quel besoin d’un particulier peut être assouvi par une start-up. L’uberisation est présente dans notre quotidien, que nous ayons besoin de :
- manger
- se déplacer
- faire des travaux
- se loger
Ces sociétés tournées vers le numérique permettent aux consommateurs d’avoir accès à des services de manière simplifiée grâce à des applications ou des sites internet faciles d’utilisation.
Par ailleurs, l’ouverture de l’économie et de la société à l’uberisation permet à de jeunes personnes pleines d’idées de lancer leur affaire en misant sur les innovations technologiques. Uber a ouvert la voie à la création de nombreuses start-ups pouvant proposer des services novateurs en nouant des liens plus directs avec les consommateurs. Pour cela, il suffit dans un premier temps d’avoir la bonne idée qui pourrait satisfaire le plus de monde possible et de se lancer grâce à des professionnels du numérique. La France devient alors une géante boîte à idées.
Les inconvénients pour le monde du travail
Néanmoins, l’uberisation ne représente pas que des avantages, mais de nombreux inconvénients pour :
- les entreprises classiques
- les prestataires
Les entreprises d’un domaine bouleversé par l’uberisation perdent de plus en plus de clients. Nous sommes nombreux à nous diriger vers des acteurs de l’uberisation au lieu des acteurs traditionnels, car les prix pratiqués sont moins chers et le service souvent de meilleure qualité.
Cette conséquence de l’uberisation est facilement identifiable dans le domaine du transport avec les taxis d’un côté et les chauffeurs de VTC de l’autre. En effet, les taxis traditionnels sont très mécontents depuis l’arrivée d’Uber sur le marché du transport de personnes, car les entreprises de VTC partisans de l’uberisation proposent des tarifs plus bas et occupent leur secteur. Pour suivre la cadence, les taxis devront proposer à leurs clients plusieurs modes de paiement – nombreux sont ceux à seulement accepter les espèces – et pratiquer des prix plus attractifs. Certaines sociétés de taxis ont souhaité s’adapter en proposant par exemple des forfaits pour des trajets vers les aéroports parisiens.
Les autres inconvénients de l’uberisation concernent les indépendants qui sont en charge de nombreuses tâches (chauffeurs dans le cas de Uber ou livreur à vélo pour Deliveroo). En effet, leur statut d’auto-entrepreneur peut entraîner une certaine précarité. Les revenus d’un chauffeur sont aléatoires alors une insécurité financière s’installe notamment s’il s’agit de sa seule activité. S’il ne travaille pas alors il ne gagne rien.
Ce statut n’apporte pas les mêmes avantages que ceux du salarié qui bénéficient des congés payés, d’un revenu fixe, d’un remboursement d’une partie de sa carte de transport voire d’une mutuelle à bas prix. En proposant à leurs collaborateurs d’avoir le statut d’’auto-entrepreneurs, les sociétés adeptes de l’uberisation font beaucoup d’économie, car ils n’ont pas de charges sociales à payer comme c’est le cas pour les salariés. En ne payant pas ces charges, ils arrivent à avoir de nombreux collaborateurs à bas prix !
L’uberisation comporte des risques pour le monde du travail où le statut de salarié ne serait plus la norme, mais bien celui d’auto-entrepreneur. Mais ce n’est pas tout, le phénomène de l’uberisation a déclenché de vives polémiques et des manifestations dans de nombreuses villes européennes.
Les polémiques liés à l’uberisation
L’uberisation a de nombreux bienfaits pour certaines start-ups et pour les consommateurs, mais elle représente un risque pour les prestataires et un ennui pour les entreprises classiques. Ces dernières années, de nombreuses polémiques liés à l’uberisation ont éclaté dans les médias, sur les réseaux sociaux et dans les rues.
Comme nous l’avons vu, les taxis sont révoltés par l’arrivée des VTC sur un marché qui était le leur jusqu’à présent. Cette nouvelle manière de commander une voiture en quelques clics a fait enrager les professionnels du métier qui n’ont pas hésité à descendre dans la rue et même bloquer des axes routiers très fréquentés pour se faire entendre. Pour eux, l’uberisation tue leur métier par conséquent plusieurs centaines d’emplois dans leur secteur sont détruits, car certaines sociétés de taxis traditionnels peuvent mettre la clé sous la porte suite aux manques de clients.
L’autre polémique lié à l’uberisation concerne les conditions de travail de certains indépendants comme les livreurs à vélo de Deliveroo. La plateforme a décidé de changer la manière de rémunérer ces indépendants. Auparavant, les livreurs étaient payés 7,50 euros à chaque course, mais dorénavant ils seront payés cinq euros, ceux refusant de signer ce changement de contrat se voit alors licenciés par la plateforme. L’autre polémique concernant Deliveroo est le manque de sécurité de ces travailleurs.
Lorsqu’ils livrent à vélo des repas aux consommateurs, ils peuvent facilement avoir un accident et ne sont pas forcément bien couverts en matière d’assurance santé.
Le marché de la location de vacances transformé par l’uberisation est lui aussi sous le feu des projecteurs, mais pas forcément pour une bonne raison. Maintenant, de nombreux propriétaires préfèrent louer leur logement via Airbnb pour quelques jours que de les louer sur le long-terme aux Parisiens alors certains quartiers de Paris se voient vidés de ses habitants. Pour éviter ce phénomène directement au modèle économique de l’uberisation, la mairie de Paris a décidé de limiter la location de courte durée à 120 nuits par an pour éviter une pénurie de logements en faveur de la location de vacances.
Pour louer votre logement sur la plateforme américaine, vous devez maintenant vous enregistrer afin d’obtenir une autorisation officielle, car nombreux locataires louent leur appartement illégalement. Certains vont même jusqu’à louer leur logement social alors que c’est totalement interdit par la loi.
Conclusion
L’uberisation est une réelle aubaine pour transformer l’économie et créer du lien social entre les particuliers autour d’un intérêt. Elle permet également à certains de trouver un travail plus facilement grâce au statut d’auto-entrepreneur mais l’uberisation a également ses inconvénients. En effet, elle peut favoriser la précarité des indépendants d’un côté et détruire beaucoup d’emplois dans un secteur de l’autre. Qu’est-ce l’uberisation va devenir ? Cette nouvelle économie va-t-elle être mieux encadrée par les lois ou va-t-elle s’envoler et transformer profondément notre société ?